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[TOP 10] Mes dix films préférés de 2015 (5-1)

Deuxième et dernière partie du classement.

5-   Le Tout Nouveau Testament.

En Belgique, il était une fois.

« Flower Power »

« Dieu existe, il habite à Bruxelles ». Avec un slogan aussi génial, il était impossible que je ne m’intéresse pas à ce « Tout Nouveau Testament ». J’avais déjà eu l’occasion, il y a quelques années, de découvrir le cinéma de Jaco Van Dormael avec cette folie qu’était « Mr Nobody », film si désarmant que je ne peux toujours pas affirmer avec certitude si je l’ai réellement aimé. Toujours est-il qu’au-delà du ressenti final, il valait certainement le détour et à ce titre, j’avais bien envie d’un nouveau regard sur ce cinéma à nul autre pareil.

Et s’il m’est toujours difficile d’exprimer mes sentiments à propos de « Mr Nobody »  (ce qui n’est d’ailleurs pas anodin !), il est certain que j’ai adoré « Le Tout Nouveau Testament ». Preuve en fut mon fou-rire au générique de fin, provoqué par l’accumulation de tout ce que je venais de voir.

Car « Le Tout Nouveau Testament » est un film dingue, dans beaucoup de sens du terme. Qu’on n’en juge par le synopsis : Dieu, qui habite donc dans la capitale de la Belgique, est un type méchant. Sa fille (oui, parce que Dieu a aussi une fille), fugue, non sans avoir piraté le système informatique de son père afin de révéler à tout le monde la date de sa mort, occasionnant un joyeux bordel à travers le monde entier. C’est le point de départ du film et il faut bien reconnaître que dans le genre scénario décalé, on a ici du très lourd.

Sans complexe, « Le Tout Nouveau Testament », vous embarque dans son univers si singulier avec le plus grand des naturels. Les sujets métaphysiques, la poésie, voilà les deux principaux piliers du style « Van Dormael », qui a l’intelligence de l’assumer jusqu’au bout. Car, si on ne sentait qu’une poussière d’excuse rien ne fonctionnerait et l’ensemble s’écroulerait comme un château de cartes. Mais ce cinéaste ne doute de rien et là est sa plus grande force.

Pour autant, par rapport à « Mr Nobody », « Le Tout Nouveau Testament » apporte quelque chose qui fait la différence : un sens bienvenu de la dérision et de l’autodérision. Là où son film précédent parait rester très « premier degré », celui-ci donne toute sa part à l’humour. Le mariage avec le métaphysico-poétique fonctionne incroyablement bien, le rire donnant toute sa saveur à l’ensemble. Un peu comme une épice dans un plat élaboré.

Bien sûr, il est difficile de tout apprécier dans « Le Tout Nouveau Testament ». Le film est si singulier, si foisonnant, que le spectateur aura parfois du mal à s’y retrouver. Mais le cinéma de Van Dormael semble ainsi fait, et on en serait presque à penser que le réalisateur se plaît parfois à perdre son public.

Osé, iconoclaste, délirant, tour à tour trivial et profond, parfois les deux à fois, un moment marrant, un autre lyrique, et de temps en temps les deux en même temps, « Le Tout Nouveau Testament », avec son casting au diapason de l’esprit du film, est un extraordinaire cadeau pour les amateurs de cinéma différent. Car quiconque attend un film qui se démarque sera servi. Il ne plaît pas à tout le monde, mais c’est aussi, parfois, un trait caractéristique de certains films notables.

4-  Whiplash.

I jazzed in my pants.

« Et si tu échoues, tu me fais l’intégrale de Patrick Sébastien à la batterie, et tu te débrouilles pour adapter ! »

Alors oui, « Whiplash » est sorti en 2014. Le 24 décembre, plus précisément. En voilà un joli cadeau de Noël cinématographique. Pourquoi alors, le retrouver dans cette sélection ? Parce que je ne l’ai vu qu’en 2015, parce que je n’ai pas pu l’inclure dans mon classement 2014 et parce que c’est mon blog cinéma et que j’y fais ce que je veux. Na !

Ceci étant dit, parlons du film. « Whiplash » est une décharge électrique. Le film est tellement bourré d’énergie qu’on en sort survolté, alors même que l’histoire en elle-même n’est pas particulièrement faite pour revigorer. Cela tient plutôt à l’ambiance générale du film, bourré de tension et de décibels, de bruit et de fureur. La bande-son, avec son jazz endiablé et ses solos de batteries déments, y joue évidemment un grand rôle.

« Whiplash » c’est l’histoire d’Andrew, jeune batteur passionné, qui, à son entrée dans une des meilleures écoles de musiques du pays, parvient à intégrer l’orchestre de l’exigeant (c’est un magnifique euphémisme) Terence Fletcher. Une histoire pour le moins tumultueuse (nouveau superbe euphémisme) commence entre le professeur et son élève. Car Fletcher est un immense partisan de ce qu’on peut appeler « la pédagogie de l’électrochoc ». En gros, pousser les gens à se dépasser par tous les moyens possibles, hurlements, insultes, voire violence physique. Un bon copain, quoi.

Avant d’aller voir le film, en regardant l’excellente bande-annonce, j’étais pris d’un certain doute. Ce sujet parvenait-il à tenir la distance d’un long-métrage sans tourner en rond, ni fatiguer son public ? La réponse, à mon sens, est oui. Oui, oui, oui et encore oui. De scène d’anthologies en scène d’anthologie (mention pour la scène « not quite my tempo »), le film parvient plus qu’aisément à développer son histoire jusqu’à un extraordinaire final, mené de main de maître.

« Whiplash », et c’est logique de par son scénario, est d’abord porté par un duo d’acteurs hallucinant. J.K Simmons, Oscar archi-mérité du meilleur acteur dans un 2 nd rôle, est époustouflant dans le rôle du professeur. Il serait injuste de résumer sa performance à ses seules (impressionnantes) crises de colère, tant la palette d’acteur ici mise à l’œuvre est bien plus variée qu’en apparence. Par des regards, des attitudes… Simmons donne toute sa complexité à Fletcher, parvenant à le sortir de la caricature. En face de lui, on trouve le jeune Miles Teller, dont le jeu plus réservé ne doit pas être un prétexte pour oublier une partition elle aussi mémorable.

Résultat, bien plus qu’un simple film pour amateur de musique (même si ces derniers se régaleront vraisemblablement), « Whiplash » est avant tout la mise en scène d’un duo parmi les plus mémorables de ceux qui m’ont été donné de voir au cinéma. La relation « amour / haine » entre Andrew et Fletcher est fascinante, notamment parce qu’elle en dit aussi beaucoup sur la passion, sur le succès, sur les rapports entre talent et travail et sur les relations « mentor / élève ». Sans prendre de gants, sans tomber dans la facilité, sans avoir le manque de tact d’offrir des réponses toute crues à son public, « Whiplash » raconte une histoire qui peut laisser songeuse à bien des égards.

3-  Mad Max : Fury Road.

On the road again.

« C’est toi qui conduis, c’est moi qui klaxonne ? »

La sensation provoqué par « Mad Max : Fury Road » est comparable à celle procurée par une montagne russe. Depuis la première minute, jusqu’à la dernière, on est comme embarqué sur un manège à pleine vitesse, dont on sort lessivé et heureux d’avoir ressenti autant d’adrénaline. Si vous n’avez pas le temps, ou l’argent, ou l’envie d’aller à Disneyland Paris (ou les trois), vous pouvez aussi vous payer un petit « Mad Max : Fury Road ». A condition d’offrir au film des conditions optimales de visionnage. Grand écran et excellent système sonore sont plus que recommandés.

« Mad Max : Fury Road » du réalisateur George Miller, le même qui a réalisé « Babe 2 : le cochon dans la ville » et « Happy Feet » (ça ne s’invente pas) est au cinéma « pop-corn » ce que le Mont Ventoux est au Tour de France, un sommet parmi d’autres, certes, mais un des plus notables. Etant capable d’apprécier tout autant, même si d’une manière différente, un cinéma contemplatif d’art et d’essai ou un blockbuster efficace, je me suis régalé devant ce film fou-furieux et explosif. Si on accepte de s’y immerger franchement et sans réticences, l’expérience délivrée devient incroyable.

Comment un film autant estampillé « action et explosion » a-t-il pu susciter autant d’adhésion, quand la majorité des films du genre ne récolte qu’un mépris à mon sens plus ou mérité selon les productions ? Premièrement, c’est parce que « Fury Road », ne triche pas avec son public. Il lui donne ce qu’il attend, une course folle, rien de plus, rien de moins. Et il le fait merveilleusement bien. C’est le deuxième point en faveur du film, son efficacité redoutable. Troisièmement, le rythme. Véritable rouleau-compresseur, ce « Mad Max » entraîne celui qui le visionne dans un récit quasiment sans temps morts, où les rares pauses ne sont que de salutaires calmes avant la tempête. Enfin, la musique. On ne parle sans doute pas assez de toute la place immense qu’occupe une bande-son dans un film. « Mad Max : Fury Road » en est un exemple particulièrement frappant. Aussi furieuse que l’histoire, la musique de Junkie XL (rien que ça) est pour beaucoup dans l’expérience du spectateur. Là sont peut-être les quatre points principaux qui font toute la force du film de Miller.

« Fury Road » vient avec fracas apporter sa contribution à une question qui me passionne : comment apprécier les blockbusters ? Trop complexe pour être abordée en détail ici, je n’y répondrai que d’une manière succincte : selon moi, tout dépend de comment on les regarde. L’école du spectateur, c’est important. La lucidité n’empêchant pas d’avoir envie de se faire plaisir, mais pas n’importe comment.

Et au risque de provoquer le débat, j’ajouterai que « Fury Road » est à mon sens l’illustration qu’une grosse production, même dans ce genre-là, peut être un film d’auteur. Car ce « Mad Max » est plus imaginatif et intelligent qu’il n’y paraît. Si le film de Miller ne respire pas l’originalité dans l’ensemble, il fourmille de détails et si son scénario est simple, son discours plutôt écologique et féministe, ne me paraît pas si bête.

Alors, prêts pour une petite montagne russe ?

2-  Kingsman : Services secrets.

Vodka pure. Pas de shaker, pas de cuillère.

« Posey, dans mon fauteuil rembourrey ».

Comment un tel film peut-il être aussi mal vendu par sa bande-annonce ? A voir les trailers de « Kingsman » on a l’impression qu’on nous promet un enième ersatz de James Bond, avec juste des gros ralentis à la Matrix pour saupoudrer le tout. Et bien, non, qu’on se le dise une bonne fois pour toute, « Kingsman » ce n’est rien de tout ça. Ça commence par un rif’ de rock, et ça se termine par les fesses d’une princesse danoise (oui, oui), avec entre les deux du pur plaisir de cinéphile voyou.

« Kingsman » c’est un film de sale gosse bien éduqué. Un « chamboule tout » qui provoque une jouissance immense. « Kingsman » c’est à la fois une déclaration d’amour à James Bond et une gigantesque entreprise de désacralisation des codes « 007 ». « Kingsman » c’est en même temps une classe immense et un état d’esprit complétement barré. Une politesse mariée avec un doigt d’honneur. Le punk réconcilié avec le costard. « Kingsman » c’est « so british » et c’est « so good ». Rarement, dans mes sorties ciné avec les potos du bled, j’ai vu un film où tout le monde avait autant la banane au générique de fin. Quel pied, putain !

Et pourtant, passé une excellente introduction parfumée d’un petit Dire Straits des familles, le film prit son temps avant de me convaincre. A part une scène d’action dans un bar merveilleusement bien mené, tout cela restait encore assez sage. Et puis vint le déclic, à partir d’un dîner chic à base de fast-food. Passé ce moment, le film décolle définitivement, pour le plus grand plaisir du spectateur. Les scènes cultes s’enchaînent, depuis le carnage dans une église extrémisme jusqu’aux trépidantes minutes finales. Plus aucun temps mort, que du bon.

Matthew Vaughn, le réalisateur du controversé « Kick-Ass » et du meilleur X-Men, « First Class », met dans ce film tout son talent de metteur en scène avec un enthousiasme communicatif. La réalisation est hallucinante de maitrise, notamment dans les scènes de combats rapprochés. A cette virtuosité et à cet état esprit, vient se rajouter en magnifique cerise sur le gâteau, une bande-son choisit avec soin, tour à tour extraordinairement adapté ou merveilleusement décalé (mention pour ce son disco à la fin du film). On mélange le tout, et voilà un cocktail savoureux au possible.

Une suite est prévue pour 2017, que j’hésite à attendre avec impatience au méfiance. D’un côté, je resigne pour un film pareil avec plaisir, de l’autre j’ai peur que l’état d’esprit ne se dilue dans une franchise. En tout cas, Matthew Vaughn reste aux commandes. On verra donc bien.

Pour finir, parce qu’un peu d’auto-promotion de temps en temps, ça ne fait pas de mal, je vous invite si le cœur vous en dit, à lire un autre article que j’ai écrit sur ce blog il y a quelque mois. Il concerne un type de films dont à mon sens, « Kingsman » est un excellent représentant, à côté de Tarantino ou d’« Hot Fuzz », j’ai nommé le cinéma « pop-geek ». Pour le lire, c’est ici.

1-  Birdman

C’est un avion, c’est un oiseau, c’est Julien Lepers ?

« Je suis, je suis, je suis… »

Le voilà donc mon favori et ce n’est pas peu dire, tant les films que j’ai mis dans ce classement m’ont plu. Mais voilà, aucun n’a pu détrôner « Birdman », que j’ai pourtant eu la chance de voir très tôt dans l’année. Le plaisir que j’ai eu devant ce film fut l’un des plus grands que j’ai pu avoir sur un siège de cinéma. Oui, carrément. La liste de ce qui m’a plu dans « Birdman » est longue. Si on regarde l’histoire, ça n’a rien d’étonnant. Non seulement « Birdman » parle du cinéma, mais en plus il est aussi question de théâtre. Mes deux grandes passions réunies dans un film aussi malin, je ne pouvais être qu’aux anges.

Car « Birdman » aborde ces deux arts magnifiques, leurs singularités, leur rapport, leurs forces, leurs faiblesses, de manière remarquable. Avec une acuité certaine, le film parvient à offrir un discours d’une grande subtilité sur l’art, mais aussi sur la critique (ah, quel délice, cette scène dans le bar pour qui, comme moi, abhorre la caste des critiques établis…). Il y est aussi question des acteurs. Va-et-vient du succès, passage du comédien de théâtre à l’acteur de cinéma, envie d’être pris au sérieux… les thèmes abordés sont passionnants. Ni dogmatique, ni méprisant, « Birdman » est tout à la fois une belle déclaration d’amour et une mise-en-scène critique de tout ce qu’il aborde, depuis le rôle de l’interprète jusqu’aux différents types de cinéma, en passant par les scènes de théâtre.

Toutes ses problématiques, « Birdman » a l’intelligence de les enrober d’un sens de l’humour exceptionnel, bien que souvent dissimulé. Le rire masqué, parlons-en. C’est aussi une des grandes qualités de ce film. Bien moins sérieux qu’en apparence, « Birdman » est tour à tour une géniale parodie et une délicieuse auto-parodie, selon les moments. Cela concerne aussi bien (entre autres) les acteurs qui s’amusent à se singer que le monde artistique, dépeint avec une lucidité ironique et subtile. Les dialogues, génialissimes, sont pour beaucoup dans cette réussite, aussi bien côté sérieux que côté rire.

Au sommet d’un casting absolument fabuleux, sans aucune exception, on trouve Michael Keaton, auteur d’une performance hallucinante, d’autant plus forte qu’elle évoque sa propre carrière, sa propre situation personnelle. Fait pour ce film autant que « Birdman » était fait pour lui, le sosie de Julien Lepers livre une composition magistrale, qui a de plus la force d’aller au-delà d’une simple performance d’acteur. Car ce dont il est question ici, c’est aussi de « mise en abime », d’une mise en scène qui cherche à brouiller les pistes entre fiction et réel. Le rôle de Riggan Thomson est donc un rôle notable, à plus d’un titre, et qui passionnera notamment tout acteur ou apprenti acteur, mais pas que. C’est pourquoi, à mon sens, un Oscar du meilleur acteur aurait été bienvenu. Sans dénigrer l’excellente performance d’Eddie Redmayne en Stephen Hawking dans « Une merveilleuse histoire du temps » (le film étant, je trouve, moins notable que sa composition en elle-même), elle me paraissait paradoxalement moins « complexe à jouer » que celle de Keaton. Ce qui n’est jamais que mon avis.

Reste à tirer son chapeau à la réalisation d’Inarritu qui, par l’illusion de ce plan-séquence permanent, saupoudre fort à propos de vertige et d’étrange son histoire. De quoi achever de placer le mexicain dans la catégorie des grand cadors du cinéma actuel. Après des débuts de carrière discret mais très bons (je conseille fortement « Amours Chiennes », son premier film), « Birdman » fut la révélation de ce cinéaste de génie. Si « The Revenant » m’aura moins convaincu malgré ses qualités techniques époustouflantes ne rattrapant pas assez un scénario à mon avis trop faible, il n’en reste pas moins que le film ayant enfin permis à DiCaprio de gagner son Oscar fut une confirmation du talent immense d’Inarritu. Dont je surveillerai dorénavant avec attention les prochaines productions.

licontinovich

Passionné par le ciné, tout simplement.

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