cinemaginarium » top 10 Ou comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer les films. Tue, 21 Apr 2020 17:07:23 +0000 fr-FR hourly 1 http://wordpress.org/?v=3.6 [TOP 10] Mes dix films préférés de 2017 /top-10-mes-dix-films-preferes-de-2017/ /top-10-mes-dix-films-preferes-de-2017/#comments Fri, 31 Aug 2018 12:42:04 +0000 licontinovich /?p=859 Continue Reading ]]> Comme chaque année, on me permettra un avis global sur l’année précédente d’un point de vue cinématographique (ben oui ici on ne parle pas de fromages, même si c’est bon le fromage) et totalement subjectif s’entend (je ne me lasse pas de le répéter).

Cette année aura été paradoxale. Plutôt homogène dans l’ensemble, chaque période de celle-ci m’aura offert son quota de très bons films, dans des genres extrêmement différents. C’est d’ailleurs probablement mon « Top 10 » avec le plus de diversité, de la comédie musicale au blockbuster en passant par le documentaire et le biopic historique, sans oublier le policier, le film engagé ou le film de science-fiction. Rien que pour cela, l’année 2017 est notable. Le paradoxe c’est que cette homogénéité m’aura offert de rares fulgurances capables de passer un cap à mes yeux. En bref, il y a eu de bons moments, mais peu d’extraordinaires. D’ailleurs, les deux derniers films du top 10 n’y figureraient sans doute pas une autre année. Attention, ne me faites pas dite ce que je n’ai pas dit : tous les films de ce classement sont au moins de très bons films, y compris le 9éme et le 10éme, en tout cas à mes yeux. Il y eut aussi quelques rendez-vous manqués, comme vous le verrez plus bas. Bref, une année fort agréable, mais à qui il aura manqué un petit quelque chose pour devenir magnifique.

Mais cela, vous n’en jugerez pas vous-même que plus loin dans l’article, car avant le « top 10 », il y a les traditionnelles mentions spéciales aka « les films qui ne sont pas dans le top 10 mais dont j’avais envie de toucher un mot parce que c’est mon blog et c’est moi qui décident ».

Mention « Il a la palme » : The Square.

Et on fait tourner les serviettes !

Et on fait tourner les serviettes !

On peut reconnaître les grandes qualités cinématographiques d’un film et ne pas totalement y accrocher pour autant, aussi étrange que cela puisse paraître. Cela m’est arrivé quelques fois, et ce fut le cas pour « The Square ». Ce film est extrêmement bien filmé, avec des audaces de plans très bien vues. Il possède une véritable singularité qui le distingue et fait sa force, notamment dans son ton pince sans rire extrêmement poussé. Et pourtant, « The Square » ne restera pas à mes yeux comme un de mes moments forts de spectateurs, si ce n’est pour cette incroyable scène du singe (ceux qui ont vu le film comprendront), absolument glaçante. Malgré tout, je ne lui nie pas le mérite de sa palme et conseille de le regarder (ne serait-ce que pour la scène que je viens d’évoquer), un autre que moi, plus sensible à l’humour et à l’esprit du cinéma nordique, y trouverait un chef d’œuvre que cela ne m’étonnerait pas.

Mention « Je ne remercie pas la bande-annonce » : Au-revoir là-haut.

"- Ah, un volontaire pour la corvée de chiottes ! -Mais je... -J'adore les volontaires !"

« - Ah, un volontaire pour la corvée de chiottes !
-Mais je…
-J’adore les volontaires ! »

J’aurai pu vraiment aimer ce film. La réalisation de Dupontel y passe un véritable cap, accédant à la beauté, tout en gardant son état d’esprit canaille. Les comédiens sont impeccables, avec en majesté un de mes chouchous (Niels Arestrup) et la révélation Nahuel Pérez Biscayart. L’histoire est prenante. Les décors sont très beaux. Alors, quoi ? Alors, la bande-annonce. Cette foutue bande-annonce qui, comme beaucoup de bande-annonces, eut le mauvais ton de trop en dire, trop en dévoiler. Le mal était fait et je ne m’en rendis compte qu’en regardant le film : il me manqua un ingrédient essentiel de la découverte, la surprise, pour véritablement être conquis. Si regarder des bande-annonces est un plaisir, il faut parfois prendre garde à certaines d’entre elles, de véritables pièges et c’est pourquoi je refuse obstinément d’en regarder pour certains films. Celui-ci me conforte dans mon choix.

Mention « Pop-Corn » : Spiderman : Homecoming.

Van Damme a fait mieux.

Van Damme a fait mieux.

Un bon petit plaisir bien geek comme on les aime ! Cela en surprendra peut-être certains (et peut-être l’ai-je déjà dit sur ce blog) mais je ne suis pas si friand de films de super-héros (pas au point d’aller mater tous les « Marvel » d’une année par exemple), à l’exception de Batman (parce que c’est Batman), des Avengers, des X-Men et de Spiderman, mais outre le Chevalier Noir, l’Araignée est le seul dont j’ai vu tous les films récents. Bien déçu par les deux volets d’Andrew Garfield (ce mec est un super comédien et sort avec Emma Stone, on peut pas tout avoir non plus !), je me demandais bien ce que ce reboot avec Tom Holland allait donner, un peu inquiet de ne pas trop accrocher à l’esprit résolument « teenage » de l’ensemble (après tout, il se pouvait parfaitement que je me découvre « trop vieux pour ces conneries »). Mais non, « Spiderman : Homecoming » fut une très bonne surprise. Certes, il n’arrive pas au niveau de l’époque Raimi. Certes, barder Spiderman de technologie enlève une bonne dose de charme au personnage. Mais si on excepte ces deux écueils, l’état d’esprit très plaisant du film, entre vannes plutôt réussies et ambiance pas prise de tête, et des seconds rôles bien écrits (notamment le meilleur ami de Peter Parker et un Hibou convaincant joué par Mickael Keaton, qui kiffe décidément les hommes-oiseaux) rendent l’ensemble très cools et surtout, une qualité très importante à mes yeux, honnête.

Mention « Blockbuster bourrin » : Le Roi Arthur : La Légende d’Excalibur.

Coucou, c'est David Beckham.

Coucou, c’est David Beckham.

Pour peu qu’on aille voir un film avec de bonnes dispositions d’esprit, on est parfois agréablement surpris. Certes, cette réinterprétation sur-vitaminée de la vie du Roi Arthur avait de bonnes chances de se transformer en nanar. Mais Guy Ritchie l’a déjà prouvé : il sait comment faire du bon bourrin. Réalisation bien énervée maitrisée, musique excellente, montage parfois astucieux, acteur principal qui paraît y croire à fond, pour peu qu’on le regarde sans trop de réticences et qu’on se laisse porter, ce film vous offrira un très bon divertissement. Si, bien sûr, vous abandonnez avant même le début l’idée d’une grande fidélité au mythe arthurien. De toute façon, vous vous rendrez compte dès la première de bataille que ce n’est pas la peine de l’espérer.

Mention « Séance foirée » : Dunkerque.

Les p'tits bateaux qui vont sur l'eau.

Les p’tits bateaux qui vont sur l’eau.

C’était LE rendez-vous de mon année cinéma. La sortie d’un nouveau film de Nolan, mon réalisateur actuel préféré et le deuxième de tous les temps derrière Kubrick. Un nouveau genre pour voir si le bonhomme était vraiment capable d’envoyer du pâté dans toutes les catégories. Hans Zimmer évidemment de la partie. Un casting avec des habitués et des petits nouveaux. Un événement historique dont l’ambiance étouffante semblait parfaitement convenir à la maitrise de Nolan et à l’une de ses obsessions : les différents niveaux de temporalité (encore une fois magistralement menés d’ailleurs). Bref, tout était réuni pour une séance mémorable. Mais non. Car à côté de moi avaient décidé de s’assoir une mère et son fils adolescent, dont les disputes incessantes me firent complétement sortir du film. Changer de siège, leur demander plusieurs fois le silence fermement ne changea rien, je ne parvins plus à m’y replonger. Voilà donc comment une séance qu’on a tant attendue peut se gâcher magnifiquement. Malgré mon caractère patient, je fus à deux doigts d’aller m’engueuler avec les responsables à la fin de la séance, mais un seul regard sur la fatigue perdue de la mère et sur la stupidité bornée de l’adolescent, me convainquit que c’était un combat qu’il ne servait à rien de mener.

Mention « Feel Good » : A voix haute : La Force de la parole.

Un hommage à Jean-Pierre Coffe ?

Un hommage à Jean-Pierre Coffe ?

Petit documentaire pas piqué des hannetons, « La Force de la parole » s’intéresse à un concours d’éloquence dans le département de la Seine Saint-Denis. Des entraînements jusqu’aux différentes étapes du concours, on suit différents candidats, tous plus attachants les uns que les autres, chapotés par leurs trois coachs, un impressionnant prof de slam, une metteuse en scène et un avocat grande gueule. Ici, contrairement au « bullshit » et aux effets de manches qu’on peut trouver dans certains concours d’éloquences, l’occasion est belle de redonner, redistribuer la parole à des gens, des profils qu’on n’entend pas ou peu. De cette libération de la parole naît un film plaisant, avec certains discours en forme de morceaux de bravoure, et nécessaire. L’ensemble reste malgré tout un peu trop convenu et « gentil » pour être véritablement magnifique et d’ailleurs, plus que les phrases bien écrites, plus que les exercices, je retiendrai avant tout le moment où l’on découvre la vie de famille des deux finalistes, un véritable moment d’humanité au naturel, extrêmement touchant.

Mention « Petit mais costaud » : Petit paysan.

"Un p'tit café ?"

« Un p’tit café ? »

Film sans prétentions, « Petit paysan » est de ses œuvres qui conquièrent son public par son mélange de force et de modestie. Porté par un impressionnant Swann Arlaud, César du meilleur acteur archi-mérité, c’est l’histoire de la lutte perdue d’avance d’un petit agriculteur pour préserver son troupeau d’une maladie. Plongée sans fard et concession dans le quotidien des éleveurs d’aujourd’hui, « Petit paysan » raconte, au travers du destin du personnage principal, un monde où la logique d’un individu et celles des institutions se confrontent violemment et parle en toile de fond de la fatigue profonde d’un univers où le rapport entre le travail et les récompenses devient de plus en plus injuste et où vivent à côté exploitations familiales et fermes informatisées, des gens qui ne font presque plus le même métier. Aux portes de mon top.

Le top 10 maintenant :

10- Star Wars : Les Derniers Jedis.

Haters gonna hate. Lovers gonna love.

Warhammer 40 000, un peu.

Warhammer 40 000, un peu.

« Les Derniers Jedis » est sans doute l’épisode de « Star Wars » qui aura le plus divisé son public, plus encore que la prélogie ou « Le Réveil de la Force », ce qui est déjà en soi un bel exploit. D’un côté, ce qui ont été séduits par ce nouvel opus, y trouvant une belle revitalisation de certains aspects du mythe et un spectacle fort convainquant. De l’autre, ceux qui l’ont purement et simplement détesté, bien souvent les puristes, au point de même exiger pour certain un bannissement pur et simple de l’œuvre du « Star Wars Universe ». Les voix « contre » criant beaucoup plus fort que les voix « pour », comme souvent d’ailleurs, notamment car on trouvera plus facilement quelqu’un qui hait « Star Wars VIII » que quelqu’un qui l’adore, j’en suis même venu à douter de mon premier jugement sur le film, qui était plutôt positif. Je suis donc retourné le voir, pensant que j’allais me rendre compte des grossiers défauts qui m’avaient échappé. Mais non. Mieux, certaines critiques que j’avais contre le film ce sont adoucies en deuxième visionnage. Les fans les plus inconditionnels de « Star Wars », dont certains vont même jusqu’à rejeter « Le Retour du Jedi » (parce que les Ewoks c’est un truc commercial), étant pour quelques-uns des gens assez fermés d’esprit (pas tous heureusement) que je n’inviterai pas à ma table, j’abandonne l’idée de les convaincre de revoir leurs jugements. Pour les autres, voici l’explication des deux raisons principales qui font que j’ai aimé « Les Derniers Jedis ». Primo, c’est fun et c’est quand même aussi ce qu’on demande à un « Star Wars » : l’histoire, et la course poursuite qui tient presque tout le film nous tient bien en haleine et les combats sont très badass (même le non-combat de fin). Secundo c’est intéressant : en étant un peu iconoclaste, le film redonne des forces au mythe au lieu de l’affaiblir par une trop grande fidélité qui le ferait tourner en rond. Le personnage de Luke Skywalker en est le meilleur exemple, lui qui accède enfin à une grande profondeur et lui avoir donné un côté torturé est une excellente idée. Tertio : c’est un film qui fait la part belle à des personnages féminins variés et originaux, et putain ça fait du bien ! Quarto : c’est très bien réalisé et visuellement très beau à quelques moments (mamma mia, la scène où le vaisseau résistant détruit la flotte du Premier Ordre en passant en vitesse lumière). Bon, bien sûr qu’il y a aussi des mauvais côtés : l’humour passe bien moins bien que dans l’épisode précédent, l’intrigue Finn / Rose est naze (mais vraiment naze) et en plus elle sert globalement à rien à part jouer du violon avec la subtilité d’un éléphant dans un magasin de porcelaine, les quelques révélations sont plutôt décevantes et il y a quand même un côté foutage de gueule sur certains trucs qui passe mal (genre la mort de Snoke, bordel, ce mec sort de nulle part, il est censé être super fort et il meurt avant même qu’on connaisse le prénom de son chien !). Il y a aussi des critiques que j’ai du mal à comprendre : genre les pouvoirs de Leïa, d’accord la scène est plutôt mal mené, mais il était quand même temps qu’on voit les pouvoirs jedis de ce personnage dont on nous parle depuis « Le Retour du Jedi ». Ah, et ne me sortez pas l’argument du réalisme, vous étiez en train de regarder un film où des vaisseaux vont en vitesse lumière, il ne semble pas que ça vous posait souci. Bref « Les Derniers Jedis » a ses défauts, mais reste un très bon divertissement. Il faut croire que je défendrai contre vents et marées tous les opus Star Wars sans exceptions (bon, pas trop à fond « Rogue One » et pas « Solo », faut pas déconner non plus mais c’est des « spin-offs » donc c’est différent).

9- Wind River.

Rester sur sa fin.

Froide tension.

Froide tension.

Jusqu’à ses dernières minutes, « Wind River » avait tout fait pour me convaincre. Déjà, le film cochait avec brio toutes les cases du bon polar moderne bien ficelé : un environnement véritable personnage de l’intrigue (les neiges du Wyoming) et un contexte social bien amené en toile de fond (les communautés amérindiennes) pour surligner une enquête prenante et une ambiance bien travaillée. Ensuite il y avait des acteurs convaincants à l’heure de prouver qu’ils peuvent faire autre chose que des blockbusters (Jérémy Renner et Elizabeth Olsen) et une partie du film franchement puissante, qui prend aux tripes, avec un (spoiler, ne lisez pas plus loin si vous voulez voir le film, vous êtes prévenu) flashback complétement inattendu, véritablement glacial car on comprend très bien la lente montée en tension qui va amener au drame. Mais voilà, plutôt que de rester sur ces belles intentions et de chiader la fin, v’là t’y pas que « Wind River » me pond quelque chose qui me fatigue grandement dans le cinéma américain, à savoir un moment de justice expéditive « œil pour œil, dent pour dent » en mode « t’es un connard de toute façon, tu l’as bien cherché ». Cette fascination peu subtile pour la vengeance privée de beaucoup de productions américaines commençant à me saouler (parce qu’outre son côté dérangeant moralement, ce qui est le gros point noir, elle est en plus une manière beaucoup trop facile de terminer une histoire), cela m’a presque gâché mon plaisir, mais par égard pour les quatre cinquième restant, vraiment très très bons, je met « Wind River » neuvième.

8- Patti Cake$. 

Nine Mile.

"Que toutes les crèmes hydratantes lèvent le bras !"

« Que toutes les crèmes hydratantes lèvent le bras ! »

Une très bonne séance, voilà ce que je retiens de « Patti Cake$ » dont l’enthousiasme communicatif m’a véritablement conquis. L’histoire ? Une fille en surpoids veut devenir rappeuse, et les deux mots que j’ai employé pour la qualifier vous font bien vous douter que ce n’est pas simple, surtout si on ajoute à cela un milieu social bas et une mère en roue libre. Oui, mais voilà, à la force de son flow et de son immense détermination, aidé par son crew improbable, Patricia ne va pas se laisser faire. Bien sûr, c’est du « feel good movie » classique et c’est toute la limite assumée du film, à savoir un côté prévisible dans le cheminement du « un personnage en difficulté arrive à faire des trucs que tout le monde pensait qu’il pouvait pas faire, et bah si, il peut, cheh ! » et « on s’entend pas bien avec ma famille, mais en fait si, on s’aime ». Voilà, c’est du classique, mais honnête et bien fait. De plus quelques trucs donnent à « Patti Cake$ » ce supplément qu’il faut pour marquer les esprits : une actrice incroyable, Danielle MacDonald, pour laquelle on ne peut avoir que du respect rapport au travail demandé par le rôle, des personnages originaux et / ou badass, quelques moments surprenants (la rencontre avec la star O-Z, complétement à l’opposé de ce qu’on attendrait d’un « feel-good movie » classique) et des morceaux de rap franchement chant-mé, comme ne disent plus les jeunes, dont certains ont même rejoint ma playlist globale Spotify.

7- 120 battements par minute. 

Rainbow warriors.

Gai Pride.

Gai Pride.

Comme je l’ai déjà dit à propos de « Winter Sleep » autre part sur ce blog, on se rend parfois compte d’à quel point un film a été fort après la séance, dans le métro ou en quittant le cinéma. C’est en marchant dans la rue après « 120 battements par minute », en ayant du mal à revenir à la normalité, presque en décalage avec les gens autour de moi, presque hébété, que je me suis rendu compte que j’avais vraiment été marqué par ce film. Peut-être pas autant que par d’autres, mais tout de même, ce fut une expérience notable de cinéma. Tout a été dit, ou presque sur « 120 battements par minute », qui restera l’un des films événements de l’année précédent, alors il ne me reste presque plus qu’à confirmer ce qui a déjà été exprimé : oui, c’est très bien joué oui, c’est très puissant, oui, c’est un film nécessaire qui nous ramène à une époque pas si lointaine où des gens crevaient dans la presque indifférence, oui, c’est un film qui fait réfléchir sur le « pourquoi du comment » de la lutte par l’exemple et qui se révèle très intelligent dans sa manière de présenter la lutte « coup de poing » non-violente mais énergique, comme quelque chose de nécessaire dans certains combats. Il y a ceux qui sont pour moi les acteurs des deux sexes les plus prometteurs de leur génération (l’incroyable Nahuel Pérez Biscayart et l’intense Adéle Haenel), c’est sans tabou mais sensible, notamment dans sa manière de présenter le sexe entre deux hommes, quelque chose qui, si on y réfléchit, n’est pas non plus si courant au cinéma. Bref, c’est une belle réussite qui mérite la grande majorité de ses éloges et de ses récompenses.

6- Visages Villages.

Voyages, voyages.

Au Nord, c'était les chorons...

Au Nord, c’était les chorons…

C’est l’histoire de JR qui rencontre Agnès et ils décident de faire un film en partant un peu partout sur les routes françaises, poser leur caméra et faire des photos. Ce film, que j’ai eu la chance de voir en avant-première, avec d’autres intentions, aurait pu n’être qu’un délire d’artistes en goguette en décalage complet avec ce qu’ils filment dans une ambiance de malaise social prenante. C’est ce dont j’avais un peu peur. Mais pas du tout. Loin d’être une expédition boboïsante dans le mauvais sens du terme et aux bonnes intentions faciles et mièvres, le voyage de Varda et JR se révèle une franche réussite et qu’ils me pardonnent d’avoir un instant douté de cela. On les sent franchement concerné par les territoires qui visitent et pas simplement en représentation. L’impression d’une déambulation presque au hasard, loin de faire fourre-tout, donne au film une grande fraîcheur et permet une grande diversité d’histoires et de témoignages humains, tous plus beaux les uns que les autres. Sans oublier Jean-Luc Godard dans le rôle de l’absent, dans une séquence mémorable. Et même quand les deux se filment simplement entre eux, on ne sent quasiment pas d’artificiel, mais bien un laisser-faire naturel et une sincérité qui fait du bien. La rencontre entre les deux artistes fait de sublimes étincelles, malgré ou grâce à l’écart de génération, c’est selon, et la conférence qu’ils donnèrent après l’avant-première confirma l’esprit de cette rencontre, drôle et touchante. JR chambre Agnès, Agnès râle pour faire genre, et leur duo provoque une belle dose de bonne humeur. On en sort conquis.

5- Patients.

Et longueur de temps font plus que force ni que rage.

Posé avec les fraté.

Posé avec les fraté.

Inspiré de l’histoire de Grands Corps Malade et d’ailleurs co-réalisé par le slameur avec Mehdi Idir, « Patients », l’histoire de la rééducation d’un jeune homme dans un centre pour handicapés,  pourrait être un énième « feel good movie » sur la reconquête du bonheur face aux aléas de la vie et sur la tolérance, une œuvre gentillette qu’on regarde déjà d’accord et qu’on oublie vite. Seulement, « Patients », dans la présentation de ce sujet qu’on ne connaît pas si bien, a le grand mérite de chercher une véritable singularité, dans son ton, dans son naturel. Pas de gros sabots, pas de grands violons, le film ne cherche la démonstration que par l’exemple, laissant faire ses situations et ses personnages, incarnés par des acteurs inconnus au bataillon mais franchement attachant. Dézinguant tout misérabilisme et toute pitié mal placée sur le sujet du handicap, c’est un film cru, souvent très drôle, très émouvant, juste. Les messages passent sans besoin de trop en faire et à cet égard, ce film est un exemple. On s’attache beaucoup à ses personnages, bourrés d’émotions, certaines mal dissimulées par une pudeur maladroite et brusque. Hymne à l’amitié, à l’amour, déclaration enflammée à la vie, présentations de luttes qui nous font relativiser comme il faut et nous rendre compte de notre chance, « Patients » est presque passé trop inaperçu par rapport aux mérites de ce film bourré d’une humanité « cabossée » mais évidemment pas moins humaine. Cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant.

4- Blade Runner 2049. 

On s’était donné rendez-vous dans 30 ans.

Orange Dynamique.

Orange Dynamique.

Ce n’est pas un secret pour ceux qui suivent mon blog : Denis Villeneuve est un de mes chouchous, le genre de réalisateur dont je suis avec attention chacune des sorties. C’est donc peu dire si j’étais emballé à l’idée de le voir réaliser une suite du grand classique « Blade Runner » et je pense que j’étais l’un des rares à aller la voir avec beaucoup de confiance. Je ne fus pas déçu. Visuellement hallucinant, c’est le sommet à ce niveau d’un réalisateur dont le travail sur l’image est une force et dont les films sont toujours marqués par une superbe photographie. « Blade Runner 2049 » a de plus le grand atout de chercher des images qui resteront, à travers le jeu des couleurs et des maquettes, plutôt qu’une orgie de CGI qui vieillira sans doute mal. Si cet aspect visuel magnifique, de l’impressionnant blanc-gris jusqu’au très marquant ton orange en passant par le bleu-noir de la pluie et le déluge des couleurs des publicités, avec des décors très inventifs et parfois sublimes (l’appartement en bois très épuré de Wallace notamment) est vraiment la grande qualité du film, l’histoire n’en est pas moins vide d’intérêt. Tout à la fois respectueux de l’original et cherchant son propre apport, le scénario de « Blade Runner 2049 » continue d’interroger sur les thématiques classiques de la science-fiction (les robots à conscience humaine, la destruction de l’écosystème…), développe intelligemment certains thèmes du premier film (les souvenirs par exemple), amène d’autres pistes à certains d’entre eux même plus intéressantes (l’histoire d’amour avec l’hologramme est autrement plus passionnante que celle, très « culture du viol », du premier opus, déso pas déso) et révèle des choses potentielles qu’on ne soupçonnait même pas (une possible révolte politique des répliquants). Bref, le challenge était très grand, mais il est relevé de très belle manière, et ce n’est pas toujours qu’on voit la suite d’une œuvre culte en être à la hauteur.

3- Battle of the sexes.

Jeu, set et match contre le patriarcat.

Non sans forcer.

Non sans forcer.

Le biopic historique est un exercice périlleux qui, souvent, ne comporte pas un grand intérêt cinématographique. L’histoire est connue, les acteurs ont du mal à dépasser la simple imitation, bref il manque souvent un supplément d’originalité, voire même une véritable vision artistique, pour en faire une œuvre notable. « Battle of the sexes » est un excellent contre-exemple. Déjà, c’est le duo de « Little Miss Sunshine » (Jonathan Dayton et Valerie Faris, un homme et une femme, tiens, tiens !) aux manettes, ce qui pose sacrément les bases quand on connaît le talent des deux pour faire des histoires incroyables d’émotions et d’humanité, ce qui se vérifie magnifiquement ici. Les sujets (l’égalité des sexes et l’homosexualité) sont évidemment très forts et surtout pris à travers un angle original (le match entre le clown machiste Bobby Riggs et la militante Billie Jean King). De plus vu que beaucoup de combats féministes et homosexuels sont encore loin d’être gagnés et absolument pas acquis, ils résonnent encore aujourd’hui malgré les années passées. Ensuite le casting est brillant : savoureuse Sarah Silverman en Gladys Herman, véritable meneuse de revue, délicieux Alan Cumming en Ted Tinling, découverte d’Andrea Riseborough (récemment éclante dans Black Mirror) et bien sûr Emma Stone, mais qui n’est (attention les yeux) même pas la plus éclatante, même si elle est formidable (et oui, je l’ai dit). Non, les deux plus extraordinaires performances du film sont celles de Steve Carell en Bobby Riggs et de Austin Stowell en mari, et qu’on ne me fasse pas l’injure de penser que j’écris cela parce que ce sont des hommes. Carell, dont on sousestime la subtilité du jeu, réussit magnifiquement à ne pas faire de Riggs une caricature mais bien un homme, certes souvent énervant, mais aussi touchant, dont on comprend bien que ce n’est pas lui le vrai problème (ce que dit d’ailleurs Billie Jean King). Quant à Stowell il campe un des plus beaux personnages que j’ai pu voir à l’écran (c’est dit), ce mari magnifique, conscient que sa femme l’a épousé par convention, mais qui continue à l’aider, vaille que vaille. Il y a une scène dans le film, et c’est d’ailleurs la plus belle, qui est une leçon de cinéma et qui mérite à elle seule le détour : c’est celle où, après avoir compris que Billie Jean l’a trompé, mais sans lui avoir rien dit, il attend un instant, dans la pénombre, les mains sur les hanches avec ses valises, avant de repartir vers une autre chambre. C’est simple et c’est émouvant aux larmes. Reste à dire que la musique est géniale, que le match de fin est filmé nickel, que le film comporte pleins de touches subtiles pour renforcer son propos (l’attitude paternaliste, main sur l’épaule, du journaliste mâle envers sa collègue femelle), que l’ambiance de l’époque est très bien rendue et que la fin m’a donné des larmes aux yeux. Nécessaire et sublime.

2- Le Concours.

Vous avez 119 minutes.

Heure de pointe.

Heure de pointe.

Sorti en 2016, mais vu en 2017 (et oui, c’est comme ça que ça marche ici), « Le Concours » est l’un des documentaires les plus forts et les plus fascinants que j’ai vu dans ma vie. Pourtant, son sujet, le concours de la Fémis, principale école de cinéma française n’est pas particulièrement un sujet-choc. Mais qu’importe. « Le Concours » est passionnant parce qu’il s’attaque à un sujet original et dont beaucoup d’entre nous ont eu une expérience en tout cas approchante (car les logiques du concours, quel qu’il soit, sont souvent similaires). Il provoque donc un grand intérêt à la fois par la curiosité et l’indentification, faisant de certaines scènes des moments de malaise presque éprouvants, tant on a de la peine pour les candidats. De plus, le film de Claire Simon, bien sûr, ne se contente pas d’avoir un bon sujet. Il le traite très bien. La caméra, ultra-discrète qui paraît filmer de manière clinique et sans filtre la face visible comme les coulisses du concours, le très bon choix des scènes, avec un déroulé chronologique attendu mais justifiée, tout cela questionne avec une grande intelligence la logique de cet événement socialement complétement admis mais en même temps si particulier. Car c’est là le grand mérite de cet œuvre, montrer ouvertement les limites du concours, limites notamment humaines, du fait de la subjectivité inhérente à la correction (d’autant plus dans un concours artistique), tout en amenant à ce qui paraît être une impasse : certes le concours est imparfait, mais quelle alternative ? Comme la démocratie, dont la citation dit qu’elle est le plus mauvais système à l’exception de tous les autres, on est forcé de se demander si malgré ses défauts, le concours n’est pas inévitable, mais ce film a le mérite d’aussi nous faire réfléchir sur le fait qu’il est sans doute possible de l’améliorer. Les questions sont posée, et c’est le rôle d’un bon documentaire que d’en ouvrir et non d’asséner des solutions dogmatiques. A charge pour le spectateur de se faire penseur.

1- La La Land.

Musique ! Et que chacun se mette à chanter !

"Un phare breton ?"

« Un phare breton ? »

Même si j’étais passablement saoulé par les affiches proclamant en gros « le film de l’année », reprise d’une critique de presse quelconque, alors que nous n’étions qu’en Janvier, « La La Land » me paraissait être un « must see » de ce début d’année pour de nombreuses raisons, les principales étant la présence d’Emma Stone (oui, je suis une groupie) au casting et le fait qu’il s’agissait là de la nouvelle œuvre de Damien Chazelle, qui m’avait totalement conquis avec « Whiplash ». J’y allais donc avec des amis, me demandant si ce film dont on me promettait « monts et merveille » allait vraiment réussir à m’emporter. C’est peu, très peu dire, que je ne fus pas déçu. Emporté par une tornade d’émotions et de beauté, j’en sortais carrément en larmes, époustouflé par ce que je venais de voir. Un contexte de fatigue rajouta sans doute à ce « lâcher-prise », mais il ne fit que l’amplifier, le vrai responsable était « La La Land ». Tant pis pour tous ceux qui trouveront cela exagéré, ce film est un de mes plus grands moments de cinéma passé dans une salle obscure. Dès le départ, « La La Land » nous entraîne pour ne plus nous lâcher, depuis cette scène d’ouverture incroyable et déjà culte, jusqu’à cet épilogue extraordinaire et déchirant. Les atouts de cette œuvre sont immenses. Commençons par la musique évidemment, puisqu’on parle là d’une comédie musicale : Justin Hurwitz, ex-coloc’ de Chazelle devenu son collaborateur privilégié et l’homme qui l’a révélé (les rencontres d’une vie, c’est parfois quelque chose) signe en collaboration avec les paroliers « Pasek and Paul » une BO de malade, dont je suis capable d’écouter les chansons des dizaines de fois sans me lasser (et je sais que je ne suis pas le seul). « Another day of sun », « Someone in the crowd », notamment, mais aussi « City of Stars », « Audition », « Start a fire » (par John Legend) ou « A Lovely Night » sans parler de cet « Epilogue » reprenant quasiment tous les thèmes du film… c’est fou à quel point toutes ces musiques donnent la pèche, émeuvent… Bien sûr, la capacité de ses musiques à durer ne peut par définition se juger tout de suite et il est trop tôt pour savoir si « Another day of sun » atteindra le niveau culte de « Singin’ in the rain ». En tout cas, dans mon cœur, c’est déjà le cas. Ensuite, il y a le travail sur l’image. La réalisation de Damien Chazelle, virevoltante, met parfaitement en valeur un soin du détail impressionnant, permettant de composer des tableaux visuels sublimes et souvent pleins de références. Continuons notre éloge en parlant du rythme, un thème cher à l’auteur du film (qui l’a écrit alors qu’il avait 25 ans soi-dit en passant !) qui dose parfaitement folie des chorégraphies et tranquillité des moments d’émotions. Et puis il y a ce duo d’acteur, Ryan Gosling et Emma Stone, dont l’alchimie impeccable donne toute sa saveur à l’histoire d’amour et dont il faut saluer l’immense travail préparatoire en chant et danse (mais aussi piano pour Gosling), pour que l’ensemble sonne crédible. Enfin, « La La Land » n’est pas que du fun. C’est aussi une très belle œuvre sur la confrontation des rêves avec la réalité, sur la célébrité, sur les idéaux artistiques et sur parfois la trahison qu’on leur inflige, sur les artistes, sur le quotidien qui abîme les histoires d’amour, un très bel éloge aux idéalistes et un film qui a l’intelligence de construire une relation de couple moderne qui (spoiler, attention !) nous brisera le cœur en ne terminant pas en conte de fée. Extrêmement triste et surprenant, mais d’autant plus fort et beau. Voilà donc « La La Land », ma merveille de 2017. L’année commençait fort.

Voilà, je vous dis probablement à l’année prochaine !

]]>
/top-10-mes-dix-films-preferes-de-2017/feed/ 1
[TOP 10] Mes dix films préférés de 2015 (10-6) /dix-films-preferes-2015-10-6/ /dix-films-preferes-2015-10-6/#comments Mon, 29 Aug 2016 15:30:08 +0000 licontinovich /?p=600 Continue Reading ]]> Tout est dans le titre, ma gueule.

 10-  Star Wars : le Réveil de la Force.

Le Rey-veil de la Force.

I'm a poor lonesome cow-girl...

« I’m a poor lonesome cow-girl… »

«  Le Réveil de la Force » est sans doute le meilleur 7ème épisode de Star Wars qu’on était en droit d’espérer. En effet, il est certain que ce film est un immense « fan service », mais comment pouvait-il en être autrement ? Faire autre chose aurait été un démentiel pari et la bande à Jean-Jacques Abrams n’avait pas d’envie autodestructrice particulière. Alors soit, va pour le « fan service ». Quand il est aussi soigné, je ne peux qu’apprécier. Certes, la base du scénario est une copie quasiment conforme de l’Episode IV, mais c’est uniquement valable pour la base. Ne serait-ce que par ses détails (un clin d’œil, un décor, un dialogue….) et par un inattendu et merveilleux sens de l’humour, le film sait faire la différence.

Les nouveaux personnages ? Tous très bien écrits depuis le trop mignon BB8 jusqu’au très attachant Finn, en passant par le jeune loup du Premier Ordre, le général Hux et le beaucoup trop classe Poe Dameron. Oui, même Kylo Ren, ne vous en déplaise ! A mon sens, ce personnage si controversé est d’une complexité bienvenue et apporte un peu de nouveauté au sein d’une galerie de vilains cinématographique qui (j’en sais quelque chose) a parfois tendance à bégayer quelque peu.

Et nom d’un chien, une héroïne qui dézingue tous les clichés de genre du cinoche, qu’est-ce que ça fait du bien, putain ! Rey, sache que tu as fait une entrée fracassante sur le podium de mes personnages féminins préférés. Ça leur apprendra, aux abrutis phallocentrés, y compris ceux du marketing de Disney qui t’ont grossièrement oublié de la campagne de jouets. Que vous le vouliez ou non, c’est aussi grâce à des personnages comme celui-là qu’on fait avancer la condition féminine, ne serait-ce que parce que dans les cours de récré, les filles (et les garçons !) pourront avoir comme modèle une héroïne qui envoie de l’entrecôte.

Bon le neuf, d’accord, mais quid des anciens ? Et bien, ils sont excellent aussi, parce que le film a su avoir le nécessaire courage d’assumer leur vieillesse. Mention spéciale à la très émouvante Carrie Fisher, n’en déplaise aux imbéciles qui n’ont su que critiquer son physique dans un concours de bassesse méprisable. La relation Han Solo/Leia Organa est ici plus touchante que dans n’importe quel autre Star Wars, parce qu’elle est fragile et offre l’image d’un couple réaliste, au-delà du conte de fées. Harrison Ford respire toujours la classe et que dire de Luke, qui n’a sans doute jamais été aussi charismatique que dans les quelques secondes de cette scène finale….

Bref, il est jouissif de regarder un film où on sent que toute l’équipe a eu vraiment à cœur d’offrir quelque chose d’agréable à son public. Tout cela finit par rendre l’ensemble si sympathique qu’on en vient à facilement pardonner au film ses quelques faiblesses, comme par exemple la carte menant à Luke, l’un des plus bancal « MacGuffin » (un objet uniquement prétexte au déroulement du scénario) de l’histoire du cinéma.

Cependant, au final, Star Wars 7, ses failles et ses points forts, seront avant tout jugés à l’aune des épisodes 8 et 9. Aura-t-il lancé une superbe trilogie ou ne sera-t-il qu’une belle promesse ? Comme le disait joliment le fils de ma marraine : « Ce film, c’est comme le ‘du’ dans la phrase ‘je veux du fromage’ ». Une transition, en somme. Où il était nécessaire de reposer les bases. En espérant que le 8 sache apporter en originalité, en étant autre chose qu’un grossier plagiat du V (avec un petit « je suis ton frère »). D’un côté je redoute ce prochain film. De l’autre je l’attends avec l’impatience d’un gosse. Wait and see.

9-   The Lobster.

Homard m’a tuer.

"J'hésite toujours entre le papillon et le dos-crawlé..."

« J’hésite toujours entre le papillon et le dos-crawlé… »

OFNI. Objet Filmé Non Identifié. Cette catégorie de films regroupe ces productions qui ne ressemblent à aucunes autres et dont vous sortez en vous disant : « what the fuck did I just see ? ». Les OFNI peuvent être désarmants, savoureux ou les deux à la fois, mais il est rare qu’ils laissent indifférents. « The Lobster » est un très bel OFNI. Ce film développe son style si particulier en l’assumant jusqu’au bout, sans complexe. Il vous entraîne dans un monde étrange avec un rythme calme et lent, puis il vous dit : « voilà, c’est fini ». En plein milieu d’un doute, évidemment. Si « Inception » avait le monopole de la fin ouverte, ça se saurait. Et vous restez dans la salle de cinéma, un sourcil relevé et un mince sourire aux lèvres. « What the fuck did I just see ? »

Dans « The Lobster », il est question d’amour et d’homards. On doit trouver l’amour, sinon on est transformé en animaux. Et c’est facile de se marier : il suffit de justifier d’au moins un truc en commun avec le partenaire. Si se marier était aussi anodin, ça se saurait, non ? Bref. Malgré tout, certains échouent et en sont réduits à espérer un animal noble pour leur nouvelle vie. Seulement, parfois pas de bol, on tombe sur la palourde. C’est couillon.

Le film développe une contre-utopie du sentiment amoureux avec une finesse ironique appréciable. Ce sentiment dont on fait des pages et des pages, des chansons et des chansons, des films et des films….j’ai nommé l’amour, « The Lobster » le fait descendre de son piédestal pour le mettre en scène dans un univers dysoptique où il a perdu toute sa flamme, mais pas pour autant toute sa beauté. L’amour, semble nous dire, « The Lobster », c’est un peu plus compliqué qu’une chanson cul-cul la praline et, sans lui enlever sa force, on en fait parfois beaucoup trop à son sujet. C’est assez iconoclaste, comme discours, mais c’est sacrément intéressant.

L’histoire, d’une intelligence certaine, se développe en chapitre, avec à chaque fois une particularité, tout en gardant une bonne cohérence d’ensemble. Elle est bien servie, il faut dire, par deux choses. Premièrement, une lumière automnale impeccable, qui donne à tout ce triste foutoir une couleur particulièrement adapté. Deuxièmement, un humour pince-sans-rire du meilleur effet, qui donne à la grande absurdité du film tout son piquant et sa saveur. Reste à signaler un casting impeccable, emmené par un Colin Farell dont les yeux de chiens battus semblaient fait pour ce rôle. Et oui, même Léa Seydoux se débrouille pas trop mal dans son personnage insupportable, ce qui aide bien. Comment ça, je suis méchant ?

En tout cas, après « The Lobster », vous risquez fort de ne plus voir les homards de la même façon. Ce qui est déjà notable.

8-   Marguerite.

Laissez-moi chanter, chanter en liberté.

« Ah, je ris, de me voir si belle, en ce miroir ! »

C’est un beau film, que ce « Marguerite ». Un film touchant, humain. A la fois triste et joli. C’est un beau film sur les rêves, sur la passion, sur l’amour, sur les défauts. C’est un film qui a le bon ton de ne se complaire ni dans l’apitoiement, ni dans la caricature. Il prend à bras les corps la complexité des sentiments humains et s’en sort plutôt bien. J’en suis ressorti songeur, les yeux dans le vague. C’est plutôt bon signe.

Marguerite adore chanter. Problème : elle chante horriblement mal. Ou plutôt, elle chante magnifiquement mal, et elle n’en sait rien, car comme Madame est une grande bourgeoise qui n’est avare ni en fêtes, ni en dons, il ne se trouve personne pour lui avouer la vérité. Une histoire lointainement inspirée de la véritable vie de Florence Foster Jenkins (hop, un petit lien Wikipédia ici).

On y trouve Catherine Frot, qui a le bon goût de nous rappeler de temps en temps à quel point c’est une actrice délicieuse. Elle incarne avec une grande justesse cette Marguerite cette femme victime de l’ennui, de l’hypocrisie. Elle aime tant chanter, même si elle le fait si mal, sans s’en rendre compte. Sans s’en rendre compte, vraiment ? Et si l’essentiel était ailleurs ? Comme elle le dit si bien, dans la scène la plus touchante du film, c’était chanter ou devenir « folle ». Une peinture délicate et complexe du rapport de chacun à sa passion. Ou pointe aussi la place des femmes dans la société bourgeoise de l’époque.

Une époque d’ailleurs particulièrement bien reconstruite, entre dadaïsme et salons bourgeois et dans laquelle le casting se fond à merveille. C’est particulièrement vrai pour le comédien Sylvain Dieuaide, remarquable en jeune journaliste qui finit par prendre en affection Marguerite. Mention aussi à Denis Mpumba pour son étrange Madelbos, à Aubert Fenoy pour son décalé Kyrill Von Priest ou à André Marcon, très bon dans un rôle pourtant difficile : celui du mari.

Cependant, celui qui trône en majesté de ce casting exquis, n’est autre que Michel Fau, immense dans le rôle du ténor en déclin devenu mentor par besoin d’argent. Comment a-t-on pu ne pas lui donner le César du meilleur acteur dans un second rôle ? Sa performance, tout bonnement extraordinaire, trouve son sommet au moment où il écoute pour la première fois Marguerite chanter. Son corps ne fait rien. Son visage ne fait rien. Seuls ses yeux parlent. Cela dure une dizaine de secondes et c’est une véritable leçon de jeu.

7-   Vice-Versa

Pix’art. 

Quand tu hésites pour ta boule au bowling...

Quand tu hésites pour ta boule au bowling…

Ils sont forts, chez Pixar, quand même. Quatre années d’affilé, 2007, 2008, 2009,2010, les mecs parviennent à envoyer du très lourd avec la régularité d’un métronome. Ça commence avec les très sympathiques « Ratatouille » et « Wall-E », ça se termine avec deux chefs d’œuvres, le sublime « Là-Haut » et l’excellent « Toy Story 3 ». Puis les gars, peut-être pour ne pas trop tuer le game, se calment un peu. Pendant trois ans, ils produisent du moins notable, le temps pour le critique moyen de se demander : « terminado la magie ? » Nullement. Les « Pixar Boys » ont plus d’un tour dans leur sac. Ils se posent deux ans pour préparer la prochaine merveille et calment une nouvelle fois tout le monde. Au calme.

Non, « Vice-Versa » n’est pas, à mon sens, le « meilleur Pixar ». Dans mon cœur, ce titre reste occupé par l’immense « Là-Haut ». Ça n’empêche pas que « VV » (pour les intimes) fait partie des tous meilleurs et tape probablement podium. Avec sa singularité mais aussi grâce à une recette qui a fait ses preuves depuis le premier « Toy Story » : des bons sentiments sans niaiserie et un mariage impressionnant d’aisance entre volonté « grand-public », exigence artistique immense et finesse du scénario. « Vice-Versa », comme les meilleurs Pixars, a deux principales qualités. Primo, ses personnages sont incroyablement touchants. Secundo, il est beaucoup plus intelligent qu’il n’en a l’air de prime abord.

Mais là où « VV » se démarque des autres productions du studio, c’est par son audace. Car  l’idée de départ est aussi bonne que périlleuse. Représenter l’esprit des gens à travers différents personnages, c’est un excellent point de départ… pour un court-métrage et cela a d’ailleurs donné matière à de savoureuses bande-annonce. Mais faire tenir cette idée sur une heure et demie sans qu’elle s’essouffle ? Plus compliqué. « Vice-Versa » y arrive pourtant, et sans temps morts.

Bien sûr, tout le film n’est pas un monument de créativité, mais Pixar a toujours préféré la poésie simple au foisonnement. Bien sûr, l’esprit humain est plus complexe que les relations entre cinq émotions, mais personne parmi les auteurs n’affirme le contraire. Il s’agit simplement d’une parabole agréable derrière laquelle se cachent des thèmes traités avec plus de finesse qu’il n’y paraît : le déracinement, la famille… ou encore la fin de l’innocence absolue. Ce sujet, abordé à travers le meilleur personnage du film, l’ami imaginaire, risque fort de vous arracher des pleurs dans une des scènes les plus tristes des films Pixar. C’est là aussi une des très grandes forces de ce studio : parvenir à me faire encore pleurer à chaudes larmes.

Que vous soyez enfants ou grands enfants, « Vice-Versa » vaut donc le détour et restera vraisemblablement parmi les plus belles réussites d’une équipe dont on attend avec impatience la prochaine merveille.

6-  Les Nouveaux Sauvages.

Introduce a little anarchy.

Vive les mariés !

Vive les mariés !

Le film dit « à sketches », où se succèdent plusieurs histoires reliées par une même thématique globale, est un genre compliqué. Deux écueils principaux le menacent : une manque de cohérence de l’ensemble et surtout une quasi-inévitable inégalité entre les différentes parties. S’il n’esquive pas vraiment ce deuxième souci, c’est peu dire que « Les Nouveaux Sauvages » s’en sort remarquablement bien dans cet exercice de style périlleux.

Le film est un impitoyable « jeu de massacre » dont le fil rouge est l’ultra-violence pouvant surgir du quotidien. Réquisitoire féroce et acide, « Les Nouveaux Sauvages » essaye de présenter par le pire à quel point notre société que l’on dit civilisé peut facilement basculer dans la sauvagerie.

L’excellent sketch d’ouverture, « Pasternak », annonce bien la couleur. Il est suivi par celui qui est peut-être le plus faible du lot, « Las Ratas », avant que le film nous expédie un gros direct du droit avec le furieux « El mas fuerte ». Suivent « Bombita » et « La propuesta », le premier étant aussi savoureux que le deuxième est déprimant. Le film se termine en apothéose avec la partie du mariage, « Hasta que la muerte nos separe », véritable morceau de bravoure en forme de crescendo impitoyable.

« Les Nouveaux Sauvages » parle d’abord et avant tout de l’Argentine. C’est une gigantesque exagération de certains des problèmes les plus graves de ce pays (violence automobile, relation pour le moins délicate avec l’administration…). Si tout cela reste une caricature explosive, reste que quiconque ayant vécu dans ce pays devrait s’apercevoir à quel point le film frappe juste. Les argentins eux-mêmes, qui sont parfois d’une grande lucidité sur leur contrée, semble d’ailleurs nombreux à le reconnaître. Parlez de « Bombita » à l’un d’entre eux et régalez-vous, ça ne va pas être triste.

Pour autant, malgré son attachement à la réalité argentine, tout le monde peut apprécier « Les Nouveaux Sauvages », même quelqu’un ne connaissant absolument rien au pays des gauchos. Le film est à la fois ultra-local et universel, ne serait-ce que parce que la violence qu’il décrit est bien loin de nous être étrangère. Tour à tour plaisir coupable ultra-jouissif à l’ironie mordante, puis démoralisant au possible, « Les Nouveaux Sauvages » est une tornade, un coup de poing, qui a du mal à laisser son public indifférent. Et qui, en ce qui me concerne, s’apprécie encore mieux au deuxième visionnage.

Médaille de bronze derrière mes deux films argentins préférés : l’excellentissime « Nueve Reinas » et ce fabuleux chef d’œuvre qu’est « El Secreto de sus Ojos ». Si vous voulez vous essayer au cinéma argentin, voilà déjà trois pistes géniales pour commencer.

]]>
/dix-films-preferes-2015-10-6/feed/ 0